Le Canada-Franco et le Québec à la croisée des chemins | French-speaking Canada and Québec at a crossroad
Qui a le droit d’appartenir ? | Who has a right to belong?
À lire aussi dans les pages du journal Le Voyageur le 30 juin 2022 et dans The Toronto Star du 4 juillet 2022. | Read this piece in Le Voyageur’s June 30 edition or The Toronto Star July 4 edition.
(The English post follows the French)
Le Canada-Franco et le Québec à la croisée des chemins
Rebelle et rêveur, mon père était un jeune audacieux, s’aventurant de Sudbury, en Ontario, cette terre de roche où il était devenu adulte, à l’Université Laval en quête d’un diplôme d’études supérieures en 1978.
Mais après son arrivée dans la ville de Québec (une ville extraordinaire, insiste-t-il), il fut exclu par ses pairs québécois – en provenance « de l’Ontario, » il avait vécu parmi les Anglais.
Peu importe qu’il soit né et ait grandi dans la belle province, qu’il soit Canadien français et catholique, ou qu’il parle un français éloquent et un anglais alors incompréhensible. C’était, comme le dirait René Lévesque en 1968, un « dead duck. » Le « cadavre encore chaud » d’un francophone hors Québec, un spectre qui rappelait (faussement) à cette société distincte ce qui arriverait si elle ne cherchait pas refuge contre l’empire et son dominion qui avaient cherché à déraciner le fait français au Canada au fil des siècles.
C’était, dirait mon père des années plus tard, une mentalité de paroisse. Qui exclut, amenant la question : qui a le droit d’être Québécois ? Qui a le droit d’être franco-canadien ? Qui a le droit d’appartenir ?
C’est une question que les communautés francophones partout au Canada, à la croisée des chemins de l’expression de nos identités, envisagent avec des résultats très différents. Nous, le Canada Franco et le Québec, suivons des chemins divergents alors que nous définissons qui nous aspirons à être.
À la veille de la Fête nationale du Québec, célébrée cette année sous la bannière de « notre langue aux mille accents, » le premier ministre du Québec François Legault jetait de l’huile sur le feu de joie traditionnel, déclarant « Il est important de ne pas mettre toutes les cultures sur le même plan; c’est pourquoi nous nous opposons au multiculturalisme. (...) Nous préférons nous concentrer sur ce que nous appelons l’interculturalisme, où nous avons une culture, la culture québécoise. »
La notion du multiculturalisme prédateur, jumelé à la loi sur la laïcité du Québec – qui a un impact particulier sur les femmes musulmanes, ainsi qu’à la nouvelle loi linguistique – un pas en arrière pour la vérité et la réconciliation avec nations autochtones, et le refus obstiné du gouvernement à reconnaître l’existence du racisme systémique aux lendemains du terrible décès de Joyce Echaquan, conspirent pour mettre la province sur la voie d’une définition étroite de qui est Québécois.
En revanche, les Franco-Canadiens choisissent actuellement une voie différente de celle de nos cousins québécois, une voie qui rejette l’idée des identités provinciales et nationales pure laine, nous conduisant à une mosaïque multiraciale, multiconfessionnelle, multilingue et multiculturelle. Nos communautés et nos institutions ont reconnu que, malgré la fougue de nos communautés, notre poids démographique décroissant pourrait ne pas soutenir la langue française au fil des générations à venir, que l’immigration francophone permettra à la langue française de prospérer, nous ouvrant à une incroyable « galaxie francophone. »
Malgré mon idéalisme sans réserve, nos communautés au Canada français sont loin d’être utopiques. Dans ma ville natale de Sudbury, une « communauté francophone accueillante, » les activistes dénoncent les barrières systémiques à l’emploi pour les immigrants francophones et la nécessité d’une stratégie de lutte contre le racisme dans le Nord pour appuyer l’équité pour les immigrants et les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Nous avons du pain sur la planche comme société.
Alors, qui a le droit d’appartenir ?
Après plus de 50 ans dans le Nord de l’Ontario, mon père continue de parler un français éloquent et un anglais encore incompréhensible. Le jeune audacieux grandirait pour devenir un leader de la Franco-Ontarie, parmi les jeunes impliqués dans la création du bien-aimé drapeau franco-ontarien.
Il n’était pas de Sudbury, ni du Nord, ni même de l’Ontario. Pourtant, il est devenu franco-ontarien. Parce qu’on ne naît pas Franco-Ontarien – on le devient.
Partout au Canada, les francophones bénéficient énormément de notre pluralité, notre Francophonie mûres de nos « mille accents, » qui nous persuadent qu’il y a beaucoup à gagner dans une citoyenneté mondiale et comme une mosaïque de sociétés globales distinctes à part entière.
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French-speaking Canada and Québec at a crossroad
A rebelle and rêveur, my father was a young audacieux, venturing from Sudbury, Ont., the Nickel City where he had come of age, off to the Université Laval in pursuit of graduate studies in 1978.
But after he arrived in la ville de Québec (a wonderful city, he insists), he was excluded by his Québécois peers — “from Ontario,” he had lived among les anglais. Among the Anglos.
It did not matter that he was born and raised in la belle province, that he was French Canadian and Catholic, or that he spoke eloquent French and then-incomprehensible English. He was, as René Lévesque said in 1968, a dead duck. A “cadavre encore chaud,” the still-warm corpse of a Francophone outside Quebec. A spectre that (falsely) reminded this société distincte of what would happen if it did not seek refuge from the empire and its dominion, which had worked to uproot the fait français in Canada over centuries.
It was, said my father years later, une mentalité de paroisse — a parish mentality. One that excludes, prompting the question: who has a right to be Québécois? Who has a right to be Franco-Canadian? Who has a right to belong?
It’s a question that Francophone communities across Canada, at a crossroads in the expression of our identities, are contemplating with vastly different outcomes. We, Quebec and the rest of French-speaking Canada, are following divergent paths as we define what we aspire to be.
On the eve of la Fête Nationale last month, celebrated on June 24 under the banner of “our language of a thousand accents,” Quebec Premier François Legault threw oil on the traditional feu de joie, or bonfire. “It’s important that we don’t put all cultures on the same level; that’s why we oppose multiculturalism,” said Legault. “We prefer to concentrate on what we call interculturalism, where we have one culture, the Quebec culture.”
Quebec’s notion of predatory multiculturalism intertwines with its secularism law (which impacts Muslim women in particular) as well as its problematic new language law (a notable transgression on truth and reconciliation with Indigenous nations). Coupled with obstinate denials of the existence of systemic racism in the terrible aftermath of Joyce Echaquan’s death, this all conspires to put the province on a path to a narrow and exclusionary definition of who is truly Québécois.
By contrast, Franco-Canadians are choosing a different path — one that rejects the notion of our provincial and national identities as being pure laine, instead connecting us back to a mosaic that is multiracial, multifaith, multilingual and multicultural. Our communities and institutions have recognized that, despite our unbreakable spirit, our declining demographic dividend may not sustain the French language over generations to come. Francophone immigration can ensure that the French language continues to thrive in Canada, opening us to an incredible “francophone galaxy.”
Despite my determined idealism, our communities in Franco-Canada are far from utopian. In my hometown of Sudbury, a “welcoming francophone community,” advocates are calling out systemic barriers to employment for francophone immigrants and the need for a northern anti-racism strategy in pursuit of equity for immigrants and First Nations, Inuit and Métis nations. We Franco-Ontarians have our work cut out for us.
And so, who belongs?
After over 50 years in northern Ontario, my father continues to speak eloquent French and still-incomprehensible English. The jeune audacieux would grow to become a leader of la Franco-Ontarie, among the youth involved in the creation of the beloved Franco-Ontarian flag.
He wasn’t from Sudbury, from the north, or even from Ontario. Yet he became Franco-Ontarian. On ne naît pas Franco-Ontarien — on le devient. You aren’t born Franco-Ontarian — you become one.
As Franco-Canadians, we benefit immensely from multiculturalism. Our Francophonie is ripe with a thousand accents, persuading us that there is much to be gained in global citizenship — and as a mosaic of global sociétés distinctes in our own right.
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