La Presse : « Pardon my French »
Pourquoi le prochain Premier ministre du Canada doit parler français | Why Canada’s Next Prime Minister Must Speak It
À lire dans La Presse
The English text follows the French version
Lorsque le Nouveau Parti démocratique du Manitoba a pris le pouvoir en 2023, l’une des premières mesures prises par le premier ministre Wab Kinew a été d’honorer Louis Riel, en redonnant au père du Manitoba et au chef métis la place qui lui revient en tant que fondateur de la province.
« C’est grâce à lui que je parle français, que je suis premier ministre et que nous sommes tous Manitobains », a écrit M. Kinew sur X, reliant son ascension au pouvoir en tant que premier premier ministre anishinaabe à l’héritage politique de Louis Riel, ancré dans la justice, l’égalité et la protection des droits des minorités.
En ramenant l’histoire à ses débuts, le trilingue Kinew – qui parle l’anishinaabemowin, l’anglais et le français – a également exposé une vision1 visant à reconnaître les racines francophones du Manitoba, à protéger les droits des minorités linguistiques et à élargir l’accès à l’éducation et aux services en français.
Au moment où le Parti libéral du Canada se penche sur le choix de son prochain chef, premier ministre de facto du Canada, le leadership de Kinew est un exemple pour les partis politiques de toutes tendances.
En effet, un leader qui ne parle pas français et qui ne peut pas communiquer avec les 10,7 millions de francophones du Canada2, soit près de 30 % de notre population totale, ne peut pas défendre les droits que les communautés francophones ont acquis au fil de générations de luttes.
Pourtant, tout le monde n’est pas d’accord.
Chandra Arya, membre du Parti libéral du Canada – le parti du bilinguisme officiel – a été le premier à proposer sa candidature à la direction du parti. M. Arya, qui « ne parle pas français et n’a pas l’intention d’apprendre », a déclaré à une balado de QUB que sa première langue « n’est ni l’anglais ni le français, mais le Canada ».
M. Arya a suscité la controverse3 lors d’une entrevue à l’émission Power & Politics du réseau CBC News, où l’animateur David Cochrane l’a interrogé sur sa maîtrise du français. « Nope », a répondu M. Arya. « Qu’il s’agisse de Québécois ou de Canadiens anglais, ce n’est pas la langue qui compte, c’est ce qu’on leur apporte », a-t-il poursuivi.
Arya a rencontré sa femme dans un cours de français il y a plusieurs dizaines d’années, a-t-il expliqué à QUB. Et « c’est peut-être la raison pour laquelle je ne veux pas retourner en classe pour réapprendre le français, parce que j’aime toujours ma femme et que je ne veux pas rencontrer quelqu’un d’autre ».
Pardon my French, mais pour citer Arya : nope.
Le français n’est pas une option : c’est un droit fondamental, souligne Linda Larocque, présidente d’Impératif français4. « On s’est battus pendant des siècles pour préserver notre langue et notre culture et ce n’est pas vrai que des enjeux soi-disant économiques vont venir amoindrir nos efforts et notre amour de la langue française. »
Oui.
En tant qu’héritière d’ancêtres dont la langue a forgé, contesté et défini les idées et les idéaux de ce pays naissant au fil des siècles, le français est indissociable de ma culture – il est au cœur de mon identité, de mon sentiment d’appartenance.
Il a coloré l’histoire et les traditions familiales, la résistance et la révolte, et a défini mon expérience politique en tant que membre de la « minorité que le Canada anglais a oubliée5 ».
La langue a toujours défini l’histoire du Canada. Elle a révélé où le pouvoir et le contrôle étaient centrés, déterminant qui était inclus – et qui était ostracisé. Elle a unifié et divisé, renforcé et érodé, façonnant non seulement l’identité de la nation, mais aussi notre expérience de la nation.
C’est pourquoi tous les chemins menant à Ottawa passent par le Canada français – par le Québec et les communautés francophones en situation minoritaire dans tout le pays. Les dirigeants qui n’ont pas reconnu ou respecté le fait français en ont payé le prix. Prenons l’exemple du conservateur Blaine Higgs, qui a recueilli le vote francophone le plus faible des 116 années d’existence de son parti, ou du premier ministre de l’Ontario Doug Ford, qui n’a jamais retrouvé sa crédibilité politique auprès des Franco-Ontariens après le Jeudi Noir en 20186.
Pour diriger ce pays, le prochain premier ministre devra défendre les droits des minorités linguistiques et reconnaître que la force du Canada réside dans les voix de tous ses habitants – des voix qui ne parlent pas toujours anglais mais qui racontent l’histoire de ce que nous sommes.
Pardon My French: Why Canada’s Next Prime Minister Must Speak It
When the NDP swept to power in 2023, one of Premier Wab Kinew’s first acts was to honour Louis Riel, restoring le père du Manitoba and Métis leader to his rightful place as the province's founder.
“He is the reason I speak French, the reason I get to serve as Premier, and the reason we are all Manitobans,” wrote Kinew on X (formerly Twitter), connecting his groundbreaking ascent to power as the first Anishinaabe premier to Riel’s political legacy rooted in justice, equality, and the protection of minority rights.
In bringing history back to its beginnings, the trilingual Kinew – who speaks Anishinaabemowin, English, and French – also outlined a vision to recognize Manitoba’s francophone roots, protect minority-language rights, and expand access to French-language education and services.
As the Liberal Party of Canada turns its attention to choosing its next leader, a de facto Prime Minister of Canada, Kinew’s leadership is an example for political parties of all stripes. Because a leader who cannot speak French and cannot communicate with Canada’s 10.7 million French speakers, nearly 30% of our total population, cannot defend the rights Francophone communities have acquired through generations of struggle.
Yet, not everyone agrees.
Chandra Arya, a member of the Liberal Party of Canada – the party of official bilingualism – was the first to propose his candidacy for the party’s leadership. Arya, who “does not speak French and does not intend to learn,” told Quebec’s Oub podcast that his first language “is neither English nor French, but Canada.”
Arya ignited controversy during an interview on CBC News Network's Power & Politics, where host David Cochrane asked him about his proficiency in French.
“Nope,” answered Arya. “Whether [it's] Quebecers or English Canadians — it's not the language that matters, it's what is delivered to them," he continued.
Arya met his wife in a French class decades ago, he told Oub. And “maybe that’s the reason I don’t want to go back to the classroom to learn French again, because I still love my wife and I don’t want to meet anyone else.”
Pardon my French, but to quote Arya: Nope.
French is not an option: it is a fundamental right, underscores Linda Larocque, president of Impératif français. “We've fought for centuries to preserve our language and culture, and it's not true that so-called economic issues will undermine our efforts and our love of the French language.”
Oui.
As the heiress of ancestors whose tongue forged, challenged, and defined the ideas and ideals of this nascent country over centuries, French is indiscernible from my culture – it is central to my identity, to my sense of belonging. It has coloured family history and lore, resistance and revolt, and defined my political experience as one of “the minority English Canada forgot about.”
Language has always defined Canada’s story. It has revealed where power and control were centred, determining who is included – and who is ostracized. It has unified and divided, strengthened and eroded, shaping not only the nation’s identity but our experience of nationhood.
This is why all roads to Ottawa lead through French Canada – through Québec and minority Francophone communities nationwide. Leaders who have failed to recognize or respect the Fait français, or the French Fact, have paid the price. Consider Conservative Blaine Higgs, who turned out the lowest Francophone vote in his party’s 116 years; or Ontario Premier Doug Ford, who has never recovered his political credibility with Franco-Ontarians after le Jeudi Noir, or Black Thursday, in 2018.
To lead this country, the next Prime Minister must champion minority language rights and recognize that Canada’s strength lies in the voices of all its people – voices that do not always speak English but tell the story of who we are.
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